Réseaux sociaux et besoins humains : bâtir une stratégie de marque durable ancrée dans la réalité

Explorez comment répondre aux besoins fondamentaux de vos clients via les réseaux sociaux pour construire une marque authentique et engagée. La stratégie de marque ne doit pas répondre à vos besoins sociaux mais à ceux de votre cible.

WEBMARKETING

LYDIE GOYENETCHE

5/4/20258 min lire

Répondre aux besoins de vos clients
Répondre aux besoins de vos clients

Comment communiquer sur les réseaux sociaux pour répondre aux besoins de vos clients cibles et engager : pour une stratégie de marque durable et efficace

Dans une époque saturée d’images, d’avis, de contenus, et de sollicitations, le rapport à la marque ne peut plus être réduit à une mécanique d’offre et de demande. Il devient relationnel, symbolique, anthropologique. Le consommateur n’est plus simplement un client, mais un être humain à part entière, avec ses manques, ses besoins, ses aspirations. C’est pourquoi une stratégie de communication digitale, et plus encore sur les réseaux sociaux, ne peut faire l’économie d’une réflexion en sciences humaines. La hiérarchie des besoins de Maslow, bien que datée, propose un socle utile : elle nous rappelle que tout acte humain, même digital, prend racine dans une quête de sens, de sécurité, de lien, d’estime et de réalisation.

Nous allons ici relire cette pyramide à la lumière des usages numériques en France en 2024, enrichis par des données sociologiques précises : genre, âge, catégories socioprofessionnelles, temps d’interaction. Car comprendre les plateformes, c’est comprendre les humains qui s’y déploient, et le monde social dans lequel ils prennent la parole.

Besoins physiologiques : Facebook et YouTube, ou la simple présence au monde

Dans l’espace digital, les besoins physiologiques se traduisent moins par la recherche de nourriture que par celle d’une stimulation minimale : voir, entendre, consommer un flux de contenu accessible. Facebook, plateforme pionnière, remplit ce rôle de "place du village" numérique où l’on passe sans objectif précis. De même, YouTube est devenu un espace d’accès universel à l’image et au son.

Facebook compte encore 45,4 millions d’utilisateurs actifs mensuels en France selon NapoleonCat (janvier 2024), et YouTube environ 50 millions (DataReportal, 2024). Ces plateformes réunissent un large public : Facebook touche les 25-44 ans en majorité, avec une légère surreprésentation des femmes (51%), et une forte proportion de professions intermédiaires. YouTube, quant à lui, attire aussi bien les jeunes (18-34 ans) que les plus âgés, avec une légère prédominance masculine (54,4%).

Dans une perspective anthropologique, cette première strate correspond à un besoin de maintenir son ancrage dans le monde, de ne pas être déconnecté de la vie sociale. La vidéo courte,  le contenu léger remplissent une fonction existentielle discrète mais fondamentale : signaler au monde que l’on est là, encore vivant, encore récepteur.

Stratégie : publier des contenus brefs, accessibles, visuels, qui s’adressent à la simple envie de distraction ou de réconfort. Il ne s’agit pas ici de convaincre, mais d’exister dans le fil de l’autre, comme un bruit de fond rassurant.

Besoins de sécurité : la stabilité sociale via Facebook et LinkedIn

Le besoin de sécurité, dans nos sociétés modernes, prend des formes nouvelles. Avant même d’être matérielle, la sécurité est, par nature, cognitive et psycho-affective. Elle se construit dès les premiers liens avec l’environnement, comme l’a montré Donald Winnicott dans ses travaux sur la continuité de l’être. Selon lui, le besoin de sécurité réside d’abord dans la capacité à faire l’expérience du monde comme fiable, prédictible, suffisamment bon. Ce besoin d’un environnement contenant et prévisible s’inscrit durablement dans les attentes relationnelles, y compris dans les interactions numériques.

Ce n’est plus seulement le toit ou l’emploi, mais aussi l’accès à des repères clairs, des communautés stables, une information crédible. Facebook, via ses groupes locaux, familiaux ou thématiques, offre cette stabilité symbolique. LinkedIn joue ce rôle dans la sphère professionnelle.

LinkedIn rassemble 28,6 millions de membres en France (NapoleonCat, 2024), majoritairement des cadres et professions intellectuelles (44% entre 25 et 34 ans). Le genre y est assez équilibré : 47,4% de femmes, 52,6% d’hommes. Facebook reste, quant à lui, le réseau social de la quotidienneté : information locale, soutien parental, solidarité de voisinage.

En sociologie, ce niveau peut être rapproché du concept de "filets de sécurité sociaux". Les groupes Facebook sur l’école, la santé, la parentalité, ou l’emploi jouent un rôle proche des structures familiales ou syndicales d’autrefois. La sécurité s’enracine donc dans la qualité du lien et dans la régularité des interactions. En ligne, comme dans la vie réelle, elle se manifeste par la capacité à savoir à quoi s’attendre, à se sentir reconnu et entouré, même de loin.

Stratégie : affirmer votre sérieux. Partager des preuves de fiabilité (avis clients, certifications, coulisses de votre activité), mettre en avant des visages connus, des lieux familiers. Faire de votre présence en ligne un repère, un signal stable dans un monde mouvant.

Besoins d’appartenance : Instagram, Snapchat et les liens faibles qui soutiennent

Le sentiment d’appartenance est un besoin éminemment social. Il s’agit de se reconnaître dans un groupe, d’avoir le sentiment d’être vu, accepté, accueilli. Instagram et Snapchat, plateformes de l’image immédiate, répondent puissamment à ce besoin.

Instagram attire 29,1 millions de Français, principalement des jeunes adultes (18-34 ans), avec une majorité de femmes (54%) et un fort taux d’engagement (plus de 12 heures par mois passées sur l’application selon WiziShop, 2024). Snapchat séduit plus de 25 millions d’utilisateurs, dont 68% ont moins de 25 ans, et une majorité féminine également (52,6%).

Anthropologiquement, ces plateformes rejouent les logiques tribales : les jeunes y forment des micro-sociétés avec leurs codes, leurs rituels (stories, emojis, filtres), leurs totems (influenceurs, marques). Ces communautés reposent sur la reconnaissance mutuelle : on existe car l’autre nous répond.

Stratégie : nourrir le sentiment de proximité. Montrer les coulisses, les visages, les gestes du quotidien. Créer des rendez-vous, des habitudes, des interactions directes. La marque y devient un "membre du groupe", pas un émetteur froid.

Besoins d’estime : LinkedIn, Instagram et X comme vitrines de soi

L’estime de soi se construit toujours dans le regard de l’autre. Les réseaux sociaux sont des vitrines d’identité : on y expose ses réussites, ses opinions, ses valeurs. LinkedIn valorise les compétences et la réussite professionnelle. Instagram flatte l’esthétique et la créativité. X (ex-Twitter) récompense la saillance de l’opinion, l’intelligence du trait, la capacité à faire réagir.

X compte 15,5 millions d’utilisateurs en France (DataReportal, 2024), avec une nette surreprésentation masculine (66,5%). Le public y est plus âgé et souvent issu des CSP+ (journalistes, experts, cadres supérieurs).

Dans une perspective sociologique, ces plateformes sont des scènes : on y joue son rôle social, on y recherche l’approbation. Erving Goffman, dans "La présentation de soi", analysait déjà cette logique de représentation identitaire.

Stratégie : valoriser vos clients. Montrer leurs réussites, relayer leurs témoignages, les associer à vos contenus. Mettez aussi en avant votre propre expertise, votre capacité à apporter de la valeur, de l’estime mutuelle.

Besoins de réalisation de soi : TikTok, YouTube, blogs et l’expression profonde

La réalisation de soi est le sommet de la pyramide : c’est le besoin d’actualiser son potentiel, d’exprimer ce qui nous anime profondément. Dans le monde numérique, cela passe par la création. TikTok, YouTube, les blogs sont autant d’espaces où l’individu devient auteur de son propre récit.

TikTok attire 24,6 millions de Français, majoritairement jeunes (plus de 50% ont moins de 24 ans), avec un fort engagement (21 heures par mois en moyenne, Meltwater, 2024). YouTube couvre une audience plus large, avec 46 millions d’utilisateurs et 37 minutes quotidiennes passées en moyenne.

Les blogs ou sites personnels, bien que moins quantifiés, jouent un rôle essentiel pour les indépendants, artistes, ou militants. Ils permettent un développement narratif long, une pensée structurée, une identité forte. C’est la continuité digitale de l’autobiographie ou du journal intime.

Stratégie : proposer des formats ouverts. Encourager vos clients à créer, à raconter, à collaborer. Offrir des outils, des guides, des espaces d’expression. Laisser la parole circuler, quitte à ce qu’elle vous dépasse. La puissance d’une marque se mesure aussi à ce qu’elle rend possible chez les autres.

Au croisement des sciences humaines et du marketing : penser l’humain avant l’algorithme

La communication digitale ne peut se résumer à une course aux vues ou à l’engagement. Ce qui se joue sur les réseaux sociaux, c’est une forme de théâtre anthropologique. L’individu y rejoue, sous forme numérique, les grandes dimensions de son humanité : survivre, se protéger, appartenir, être reconnu, s’accomplir.

En intégrant ces dimensions dans votre stratégie, vous changez de posture : vous cessez d’être un simple émetteur de contenus pour devenir un acteur relationnel. Vous comprenez que la stratégie digitale est d’abord une stratégie de l’attention, de la reconnaissance, du lien symbolique.

Les données démographiques ne sont pas secondaires. Elles éclairent cette quête humaine dans sa diversité : une femme de 28 ans sur Instagram ne cherche pas la même chose qu’un homme de 50 ans sur LinkedIn. Les CSP, l’âge, le genre, la temporalité de connexion sont autant de signaux culturels qu’il faut décoder.

Conclusion méditative : communiquer, c’est d’abord rencontrer

Communiquer, au fond, c’est faire acte d’hospitalité. C’est inviter l’autre dans un espace où il pourra être vu, reconnu, transformé. Une stratégie de marque efficace et durable ne consiste pas à parler fort, mais à écouter finement, à s’ajuster au rythme et aux besoins profonds de ses clients.

La pyramide de Maslow, transposée à l’univers digital, nous rappelle que derrière chaque clic, chaque scroll, chaque like, il y a une attente humaine. Savoir y répondre, avec justesse et respect, c’est inscrire sa marque dans la durée, non comme un simple vendeur, mais comme un acteur culturel, social et symbolique.

Les chiffres ne font pas tout, mais ils éclairent le chemin. Et la stratégie de marque devient alors un chemin d’attention : à soi, à l’autre, au monde. Une voie exigeante, mais féconde.

Enfin, rappelons qu’un community management ne saurait se résumer à la publication de belles photos ou de contenus léchés. Pour être véritablement performant, il doit s’incarner dans une interaction sincère, une capacité à entrer dans la parole des autres, à valoriser authentiquement le contenu de leurs comptes. C’est dans cette circulation du sens, enracinée dans la réalité propre de votre entreprise, que se construit la confiance. Une marque qui dialogue, qui cite, qui répond, qui partage — non par stratégie mais par engagement réel — tisse des liens bien plus solides que celle qui s’expose sans jamais se mouiller. L’authenticité n’est pas un atout de façade, c’est la condition même d’une relation durable.

Communiquer, au fond, c’est faire acte d’hospitalité. C’est inviter l’autre dans un espace où il pourra être vu, reconnu, transformé. Une stratégie de marque efficace et durable ne consiste pas à parler fort, mais à écouter finement, à s’ajuster au rythme et aux besoins profonds de ses clients.

La pyramide de Maslow, transposée à l’univers digital, nous rappelle que derrière chaque clic, chaque scroll, chaque like, il y a une attente humaine. Savoir y répondre, avec justesse et respect, c’est inscrire sa marque dans la durée, non comme un simple vendeur, mais comme un acteur culturel, social et symbolique.

Les chiffres ne font pas tout, mais ils éclairent le chemin. Et la stratégie de marque devient alors un chemin d’attention : à soi, à l’autre, au monde. Une voie exigeante, mais féconde.