Le covoiturage: un enjeu environnemental, économique, urbain et social
Le covoiturage, longtemps perçu comme une pratique marginale ou ponctuelle, s’impose aujourd’hui comme une réponse incontournable aux grands défis que traversent les territoires, et notamment les territoires ruraux comme la Dordogne. Dans un contexte où les coûts liés à la voiture individuelle explosent, où les zones à faibles émissions (ZFE) se multiplient et où les trajets domicile-travail deviennent une source de stress et d’inégalités, le covoiturage ouvre une voie à la fois pragmatique, solidaire et durable.
Un levier de décarbonation des mobilités
En France, près de 70 % des trajets domicile-travail sont réalisés en voiture individuelle, un mode de transport qui génère à lui seul environ 15 % des émissions nationales de gaz à effet de serre. Le covoiturage permettrait, s’il était massivement déployé, de réduire cette empreinte. En moyenne, chaque trajet partagé évite six kilos de CO₂. Atteindre les objectifs nationaux de trois millions de trajets quotidiens permettrait d’économiser 4,5 millions de tonnes de CO₂ par an.
En Dordogne, comme dans de nombreux départements peu denses, le réseau de transport en commun ne couvre pas toujours les besoins réels des travailleurs. Pour celles et ceux qui partent tôt le matin ou rentrent tard le soir, la voiture reste souvent le seul moyen de conserver un emploi. Ici, le covoiturage ne remplace pas les bus : il les complète intelligemment, en mobilisant les ressources humaines du territoire.
Un enjeu économique majeur pour les ménages
Avec un coût moyen de 4 210 € par an, la voiture représente une charge lourde, en particulier dans les zones rurales où les distances sont plus grandes et les alternatives rares. À Thiviers, Sarlat ou Terrasson, mutualiser les frais devient un acte de solidarité autant qu’un réflexe économique.
Des plateformes comme Klaxit ou BlaBlaCar Daily, parfois soutenues par les collectivités, permettent de répartir les frais tout en instaurant une forme de confiance mutuelle, qui dépasse la simple transaction. On n’échange pas seulement un trajet, mais une part de son quotidien.
Une réponse aux problèmes de congestion urbaine
Même en Dordogne, certaines zones périurbaines comme Périgueux ou Bergerac connaissent des tensions de circulation aux heures de pointe. Le covoiturage contribue à désengorger ces axes, à préserver la qualité de l’air, et à réduire la pression sur les parkings, tout en fluidifiant les entrées de ville. Pour les entreprises installées en zone artisanale ou sur des zones d’activité isolées, il s’agit d’un facteur d’attractivité pour recruter autrement qu’à l’échelle locale.
Un outil de cohésion sociale
Au-delà du transport, le covoiturage est un tissage humain, une trame invisible qui relie les habitants d’un territoire. En partageant le même véhicule, des gens qui ne se seraient jamais croisés se reconnaissent soudain comme voisins, collègues ou compagnons d’itinéraire.
Dans les villages de Dordogne, où la solitude peut frapper fort — notamment chez les jeunes sans permis ou les seniors encore actifs —, le covoiturage devient un lieu d’échange, une manière de rester ancré dans la vie sociale du territoire.
Pour les entreprises, c’est aussi un levier de qualité de vie au travail : moins de stress, des liens renforcés, un sentiment d’appartenance. C’est une manière de transformer le temps contraint du transport en temps relationnel.
Des freins à lever
Les freins sont bien connus : horaires incompatibles, manque de confiance, dépendance perçue. Mais en milieu rural, ces obstacles peuvent être surmontés en s’appuyant sur les valeurs de transmission, d’entraide et de proximité. Là où les transports publics ne peuvent être omniprésents, les liens humains deviennent le réseau.
Exemples d’entreprises engagées
Des groupes comme Orange, Decathlon ou SGS ont déjà pris le virage. Mais ce sont aussi les PME, les coopératives agricoles, les structures de l’économie sociale qui peuvent, en Dordogne comme ailleurs, être pionnières. Certaines intègrent déjà le covoiturage dans leur politique de mobilité, avec des bénéfices RH, écologiques et symboliques.
Vers une stratégie publique ambitieuse
L’État encourage désormais ce mode de transport via le Plan National Covoiturage (2023-2027), et la Loi d’Orientation des Mobilités (LOM) facilite son intégration dans les plans de mobilité. Les communautés de communes rurales, comme celles de la vallée de l’Isle ou du Périgord Vert, peuvent y voir une opportunité de renforcer la cohésion de leurs bassins de vie.
Un avenir connecté et intelligent
Avec l’intelligence artificielle et les outils de géolocalisation, le covoiturage devient une solution fluide et prédictive, capable d’anticiper les pics de déplacement, d’ajuster les correspondances, et même de valoriser l’impact social des trajets partagés. Mais derrière ces algorithmes, ce sont toujours des mains qui s’ouvrent, des visages qui se croisent.
Une transmission douce au service du territoire
Conclusion orientée séminaire "Cohésion & lien social"
En Dordogne, le covoiturage n’est pas seulement un enjeu environnemental ou économique. C’est une manière de prendre soin les uns des autres, une façon silencieuse mais puissante de réapprendre à faire route ensemble. Il incarne cette attention du quotidien qu’on transmet comme un secret de famille : le bon chemin pour éviter les nids-de-poule, la place à l’ombre près de la mairie, le moment juste où dire bonjour sans déranger le silence du matin.
Comme cette Clio un peu ancienne, bien entretenue, qui attend devant une ferme à 7 h, moteur encore tiède, chauffage allumé, musique locale à la radio, le covoiturage raconte une histoire de territoire et de confiance. Il n’y a rien à prouver, seulement à partager.
Chez Euskal Conseil, nous pensons que ces gestes modestes, ces attentions invisibles, sont la véritable matière première du lien social. Notre séminaire “Cohésion & lien social” est une invitation à les reconnaître, les encourager et les inscrire au cœur de vos projets : entreprises rurales, associations, collectivités ou coopératives.