Le paradoxe managérial et le management
Dans nos formations en management vous apprendrez la différence entre le leadership, le leading et le management sans compter toutes les notions d'autorité d'intérêt individuel et collectif. Cet article se veut une réflexion terrain sur certaines problématiques des managers opérationnels
MANAGEMENT
Lydie GOYENETCHE
9/17/20245 min lire


Management et Leadership : Résonances humaines, dynamiques collectives et ancrage ESS
« Diriger, ce n’est pas dominer. C’est habiter un espace avec d’autres. »
Penser autrement l’autorité dans l’ESS
Dans le monde de l’entreprise, les concepts de management et de leadership sont souvent employés comme synonymes. Pourtant, confondre les deux, c’est ignorer la complexité de l’humain au travail. Et dans le cadre spécifique de l’économie sociale et solidaire (ESS), cette distinction prend tout son sens.
Le management structure, planifie, organise. Le leadership inspire, fédère, ouvre des possibles. L’un trace la carte, l’autre incarne le cap. Dans les structures de l’ESS, des TPE aux associations en passant par les coopératives, ces deux dimensions s’entrelacent souvent chez une même personne. Et cette articulation ne fonctionne que si l’on y intègre une troisième force : les dynamiques de groupe. Car une équipe, ce n’est pas seulement des compétences mises en commun : c’est un monde relationnel, traversé par des émotions, des projections, des espoirs.
Le rôle discret du manager
Le manager, dans ces structures, n’est jamais un simple détenteur d’autorité. Il ou elle est souvent gardien du cadre, garant d’une cohérence entre vision et moyens, entre aspirations et contraintes. On pense ici à ces coordinateurs de réseaux coopératifs qui, dans l’ombre du quotidien, veillent à maintenir le lien entre autonomie locale et cap commun, sans jamais trahir l’esprit qui anime leur mission.
Le leadership comme présence silencieuse
Le leader, lui, n’impose rien. Il se laisse reconnaître. Dans l’ESS, le leadership n’est pas spectaculaire. Il s’incarne dans la fidélité aux engagements, dans la capacité à traverser les tensions sans fuir, dans une présence qui, silencieusement, rassemble. Dans certains projets solidaires, il suffit parfois d’un regard ou d’une parole juste pour ranimer l’élan d’une équipe fatiguée. Ce type de leadership ne cherche pas à convaincre, mais à relier.
Une gouvernance habitée, à l’écoute du groupe
Cette manière d’être ensemble ne peut être pensée sans une attention particulière aux dynamiques de groupe. Kurt Lewin, en son temps, avait pressenti que l’efficacité d’un collectif dépendait moins de la somme des talents que de la nature des interactions. Gouverner, ce n’est donc pas seulement distribuer des tâches : c’est ajuster un tissu vivant, fait de tensions et de rythmes. Toute expérience de gouvernance partagée nous rappelle combien la qualité du lien prime sur l’efficacité immédiate.
L’inconscient collectif au travail
Wilfred Bion, quant à lui, a montré combien les groupes sont aussi traversés par des fantasmes, des peurs, des attentes irrationnelles. Dans l’ESS, ces mouvements inconscients prennent parfois des formes particulières : sur-idéalisation du fondateur, attente magique d’un sauveur financier, repli silencieux face aux difficultés de gouvernance. Ces réalités ne sont pas des fautes : elles disent quelque chose de notre humanité. Le vrai leadership ne cherche pas à les effacer, mais à les accueillir sans s’y laisser enfermer.
L’éthique incarnée plutôt que la performance proclamée
Ainsi, dans cette économie du sens, le leadership transformationnel ne consiste pas à faire rêver à grands coups de slogans. Il consiste à habiter une éthique. Il se manifeste dans la manière dont une réunion est animée, dans l’attention portée à une personne en retrait, dans le courage de dire les choses sans humilier. Il s’incarne, non dans les discours, mais dans les gestes discrets, les décisions lentes, les tensions assumées.
Accompagner sans imposer
Ce que certains appellent la vision stratégique n’est ici qu’une manière d’ajuster, avec délicatesse, l’élan collectif au réel du terrain. On ne pilote pas un chantier d’insertion comme on pilote une startup. On n’anime pas un CA d’association comme on gère un comité de direction. La finesse, ici, vaut bien plus que la performance.
Lire les signes faibles, créer du sens
Alors comment faire ? Comment articuler rigueur et accueil, autorité et vulnérabilité, structuration et souffle ? Il faut d’abord apprendre à lire les signaux faibles. Non pour contrôler, mais pour comprendre. Un conflit latent, une fatigue morale, un enthousiasme qui retombe : tout cela parle. Encore faut-il y prêter attention.
Habiter le langage partagé
Il faut aussi créer des espaces où la parole peut circuler autrement. Non comme exutoire, mais comme lieu de recomposition. La parole partagée est parfois plus réparatrice qu’un plan d’action. Mais elle ne s’improvise pas. Elle se structure, comme une liturgie, avec ses règles, ses silences et son rythme.
Respecter les temporalités du collectif
Penser en termes de rythmes plutôt que de normes permet d’honorer la temporalité propre de chaque équipe. Certaines avancent vite, d’autres ont besoin de mûrir. Il ne s’agit pas d’appliquer un modèle, mais d’accompagner un devenir.
Posture réflexive et lucidité du rôle
La posture réflexive devient alors essentielle. Non pour se perdre en introspection, mais pour habiter avec lucidité le rôle que l’on occupe. Être manager dans l’ESS, c’est aussi accepter de ne pas tout savoir, de ne pas tout maîtriser. C’est se laisser traverser par ce que l’on ne comprend pas toujours, sans renoncer à la clarté.
Entre rigueur et hospitalité : créer un espace habitable
Enfin, il faut articuler rigueur et hospitalité. Tenir un cadre, c’est poser des limites, oui. Mais c’est aussi créer un espace habitable. Un espace où chacun peut exister sans devoir jouer un rôle. Un espace où la parole est possible, même maladroite. Un espace où la dignité de chacun est le socle du vivre-ensemble.
Une voie propre, féconde et humaine
Dans les structures de l’ESS, il ne s’agit pas d’adopter des modèles importés du privé, ni de s’enfermer dans une posture sacrificielle. Il s’agit de trouver un chemin propre. Un chemin où management, leadership et dynamique humaine s’interpénètrent. Un chemin exigeant, mais profondément fécond.
Écouter l’invisible, rendre possible
Le bon manager n’est pas celui qui anticipe tout. C’est celui qui sait écouter ce qui cherche à émerger. Le bon leader n’est pas celui qui galvanise, mais celui qui rend possible. Ce ne sont pas deux figures distinctes : ce sont deux visages d’un même engagement.
Un même souffle, une même question
Management, leadership et dynamique de groupe ne sont pas trois fonctions à juxtaposer. Ce sont trois respirations d’un même souffle. Trois langues pour dire une même chose : que l’humain reste le cœur battant de toute stratégie.
Et peut-être que la seule vraie question est celle-ci : comment, dans ce monde fracturé, tenir ensemble la complexité sans perdre la clarté ? Comment, dans l’économie du lien, continuer à avancer sans se trahir ?




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